La montée finale vers les Orres arrivait comme la cerise sur le gâteau. Les 15 derniers kilomètres furent vraiment jouissifs ! Personne devant, personne derrière, quatre pick-up puissants dans les mains…une bien belle équation pour une non moins belle fin de journée ensoleillée. Après la journée passée à rouler lentement, nous nous sommes fait plaisir en utilisant la puissance des véhicules. Non pas en dépassant les limitations de vitesse mais en appuyant un peu sur l’accélérateur sur les petites routes de montagne en restant bien entendu très prudents. Pas question de rouler inconsciemment et de planter les véhicules.
Personnellement, cette montée avait une saveur toute particulière. L’année précédente, j’étais monté aux Orres en Jeep essence surchargé de 350kg de matériel de sono et après un détour mémorable et nerveusement très éprouvant. Cette Jeep qui était complètement étouffée en montagne, qui manquait cruellement de puissance, dont le freinage était plus que limite et dont l’embrayage chauffait à la limite de la fonte à chaque redémarrage en côte.
Venant de Gap et après un orage dantesque qui avait inondé la Jeep dont le seul toit était une toile plastique trop petite, j’avais conduit avec 5-10cm d’eau aux pieds selon l’inclinaison de la pente, le derrière au frais, les sièges étant trempés et frigorifié par la pluie, le froid et surement aussi la peur, avec du recul. Peur de rester bloqué en redémarrant maintes fois sur cette corniche où nous peinions à monter, sur laquelle se croiser était tout une histoire et sur laquelle nous devions croiser bien des touristes descendant, la route normale étant bloquée par une coulée de boue. Peur de glisser avec l’adhérence précaire de la Jeep montée de pneus de franchissement de 22 pouces. Peur enfin de ne pas voir un obstacle avec la pluie, les essuie-glaces inefficaces et les phares faibles. L’ascension, même en poussant à fond avait été vraiment pénible pour la Jeep et le Pathfinder (équivalent du pick-up que j’avais cette année en SUV) me précédant devait presque freiner pour ne pas me larguer dans la nuit car avec tout cela, nous étions arrivés très tard, vers 21h30-22h à l’hôtel des écrins aux Orres.
Pouvoir monter sans se demandant si j’allais y rester ou si le véhicule aurait assez de force pour me porter jusqu’en haut était un grand soulagement manifesté par cette volonté de pousser dans les reprises d’après lacets. Le Navara ne demandait que cela en plus. Bridé à des vitesses indignes de sa puissance de franchisseur sur les étapes, le véhicule prenait plaisir à se lâcher et ça se sentait.
Nous sommes arrivés en haut très vite et avons eu droit à une place de parking sur la place des Orres. Là aussi, grand changement. L’année précédente, arrivés les derniers nous avions du nous garer à l’écart de la station. Point de tout cela cette année.
Une fois les véhicules garés, vidés et les bagages récupérés, nous avons retrouvé l’accueil si sympathique de l’hôtel. Dans les chambres nous attendaient les traditionnels paquets cadeaux avec des échantillons de produits alimentaires, céréales, friandises. Ces derniers ont été tout droit dans la glacière pour les jours suivants de sandwichs aux poulet que je détestais. Et ces jours revenaient tous les 4 jours du fait du roulement des sandwichs. Ces jours-là, n’aimant pas le poulet froid, je faisais ma journée sur une compote, un fruit et de l’eau. Quand je n’avais pas peur d’avoir mal au ventre, je mangeais également quelques échantillons alimentaires de la caravane mais ce n’était guère digeste…et très calorique sans réellement donner beaucoup d’énergie.
Comme l’année dernière, le repas était royal. Buffet d’entrée avec crudités, charcuterie puis plat de pâtes avec accompagnements différents selon la préférence de chacun puis fromage râpé. Je n’avais pas mangé de pâtes depuis très longtemps même peut-être depuis le départ du Tour, je me suis donc réellement goinfré et vraiment régalé. En plus d’avoir bien mangé, nous n’étions pas seuls dans cet hôtel. Il y avait également des journalistes de France Télévision, de la radio. Nous avons pu voir des têtes connues. C’était marrant de les voir en vrai, de les voir déconner avec les autres sans la retenue nécessaire à leur métier.
Fatigués par la longue journée mais pas réellement décidés à aller nous coucher, l’envie de profiter de la montagne étant la plus forte, nous avons été faire un tour dans la station étonnamment calme pour un mois de Juillet. Après des discussions sympathiques, nous nous sommes séparés et une hôtesse m’a accompagné dans la montagne pour nous balader et observer. J’avais vraiment envie d’aller me balader dans la montagne ‘by night’ et cette dernière m’avait déjà fait part de son envie, envie partagée, d’aller observer les étoiles. L’endroit était idéal. Altitude, ciel dégagé, plan incliné. Nous nous sommes retrouvés là, au milieu d’une pente couverte d’herbe, dans le noir le plus complet avec une simple LED blanche pour nous guider, observant les lumières de la station au loin. Allongés, nous sommes restés à contempler les étoiles dans le silence de la montagne. C’était vraiment extraordinaire. Un magnifique moment de communion. Pendant un temps difficile à estimer, nous avons quitté le Tour et avons plongé dans l’infini du ciel étoilé de nuit. Un moment magique comme on n’en vit que trop peu. Un moment intemporel. Un moment dont on se rappelle longtemps après le Tour.
Après ce grand moment, nous sommes redescendus du nuage où nous étions montés et à la station afin de retrouver les autres et me concernant pour aller trouver un sommeil vraiment attendu.
Damien B.
Cela faisait un moment que je n’étais pas passé sur ton blog Martin, et ça fait plaisir de voir la suite du récit. J’ai d’ailleurs maintenant quelques étapes de retard à rattraper.
Pour te souvenir en détails de journées qui se sont déroulées plusieurs mois auparavant, tu rédigeais un « journal de bord » lors de chaque étape ?
PS : les photos illustrant la partie 27, sont superbes ! Surtout la 1ère avec la balustrade, ça rend vraiment bien.
Martin
Merci pour les photos mais celles-ci ne sont pas de moi mais d’une hôtesse. Elle en a pris très peu mais les quelques une sont très jolies en effet.
Sinon, pour répondre à ta question, je ne rédigeais pas de journal de bord mais j’ai beaucoup de mémoire pour ce qui me passionne. Et le Tour étant probablement l’une des événements les plus marquants pour moi ces dernières années, je garde énormément de souvenirs de ces périodes intenses. Après de base, j’ai beaucoup de mémoire en ce qui concerne les situations et les personnes, la façon dont elles se fondent dans les moments de vie. J’analyse beaucoup tout ce qui se passe autour et prend pas mal de recul. Donc ça aide pas mal quand il s’agit de décrire et de raconter.
Ensuite, avec le road book de la société, les photos, le road book d’ASO, je remets de l’ordre dans tous ces souvenirs. Le journal de bord était intérieur si on veut. Mais rien d’écrit, je n’ai commencé à écrire qu’au mois d’Août et ai eu le récit rapidement en tête en sachant ce que je voulais y mettre plus ou moins et au fil des articles j’ai rajouté certaines choses, suis revenu sur certains passages marquants ou anecdotiques. Après, il est certain que des étapes auront été plus suivies que d’autres qui seront passées totalement inaperçues.
Et de même j’ai beaucoup de souvenirs en plus qui pourraient créer d’autres articles. Des moments d’un peu tout le temps. Mais, ce ne serait probablement pas intéressant et répétitif à force.
Je pense à faire une version papier plus complète et mieux construite, il y aura surement plus d’anecdotes encore et de récit dans celle-là.
On verra…
Damien B.
Quelle mémoire impressionnante alors !
Car pour te souvenir en détails des repas ou des emplacements où tu garais la voiture tu as dû être très marqué par ces situations.
Merci encore de nous faire vivre ta passion pour le Tour de France.
C’est toujours un plaisir de lire tes articles.